lundi 28 mars 2011

Une société hiérarchisée
Dans la société d'Ancien Régime, les individus ont une existence sociale et juridique au travers des communautés dont ils sont membres et qui les représentent : famille, seigneurie, communautés d'habitants, de métiers, etc. Chaque corps, chaque communauté, chaque état a son statut, ses devoirs et ses privilèges qui l'identifient et le distinguent des autres. Ce n'est pas l'individu qui a une personnalité juridique ou une existence politique, mais le groupe. Il y a une multitude de groupes : les ordres religieux, les villes, les communautés rurales, les corps de métiers, les collèges de l'Université, les régiments,… Ainsi, dans les élections qui sont nombreuses, ce ne sont pas les individus qui votent, hommes, femmes ou enfants, mais le chef de chaque communauté de famille ou de métier, car ce sont elles qui sont les membres des villes.
Ces corps sont hiérarchisés en fonction d'une échelle de valeurs qui est proportionnelle au désintéressement. Cette échelle de valeurs, appelée dignité, classe les positions sociales en fonction de la hiérarchie des ordres : une position financière plus fortunée qu'une autre peut être pourtant jugée inférieure (pauvre nobliau supérieur au financier, l'officier seigneurial supérieur au laboureur). D'une façon générale, les fonctions économiques sont considérées comme moins dignes que les fonctions nobiliaires désintéressées, qui elles-mêmes sont moins dignes que les fonctions relevant du domine spirituel. À l'intérieur de chacun des ordres, cette hiérarchie se décline pour ordonner toutes les fonctions sociales. Ainsi, dans l'ordre économique, le secteur primaire est considéré le plus digne (agriculture, mine, pêche, forêts), l'artisanat un peu moins, ensuite on place le commerce et le négoce qui sont juste au-dessus des métiers les plus vils : l'usure (banque) et la prostitution. En effet, la conduite noble est celle qui se sacrifie pour l'honneur (pour l'intérêt général), tandis que l'activité économique cherche un gain, un profit, qui est plus grand chez le commerçant que chez l'agriculteur, chez l'usurier que chez le commerçant.